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2 mars 2011 3 02 /03 /mars /2011 09:59

Grandeur et décadence,

 

            L’actualité mondiale et celle française montrent simultanément la grandeur des uns et la décadence des autres. Les insurgés du « Printemps arabe » sont un exemple évident et historique de grandeur faisant basculer des régimes dictatoriaux et décadents. Comme l’écrit Jean Daniel : « Nous n’avons pas ici de kamikazes, de fanatiques artisans des attentats suicides. Ils ne tuent pas, ils laissent le péché du meurtre à leurs ennemis…Ils imposent la force immense et collective de leur seule présence. Voilà bien ce qui nous sépare des chevaliers de l’extrémisme. » Toutes les grandes démocraties mondiales ont mis du temps à comprendre la grandeur de ces aspirations. Nous avons trop souvent considérés les habitants du  Maghreb comme des êtres difficiles à comprendre et ne pouvant être canalisés que par des régimes forts. Le monde arabe faisait peur et le continent africain restait le symbole de la pauvreté, avec ce que cela suppose d’incapacité à s’assumer. Dans son discours du 26 juillet 2007 à l’université de Dakar, Nicolas Sarkozy n’avait pas craint de dire que le problème principal de l’Afrique venait de ce que : « L’homme africain n’est pas assez entré dans l’histoire…Le problème de l’Afrique, c’est qu’elle vit trop le présent dans la nostalgie du paradis perdu de l’enfance…Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n’y a de place ni pour l’aventure humaine ni pour l’idée de progrès. » Cette arrogance d’une ancienne puissance coloniale était une preuve de non respect et donc une forme de décadence.

            En revanche, le 4 juin 2009, Barack Obama a prononcé au Caire un discours plein de grandeur  à l’attention des musulmans du monde entier. Il a dit notamment : « Tant que notre relation restera définie par nos différences, nous donnerons  du pouvoir  à ceux qui sèment la haine, et non la paix, et qui encouragent le conflit au lieu de la coopération qui peut aider nos deux peuples à connaître la justice et la prospérité. C’est ce cycle de la défiance et de la discorde qui doit être brisé. Je suis venu ici au Caire en quête d’un nouveau départ pour les Etats Unis et les musulmans du monde entier, un départ fondé sur l’intérêt mutuel et le respect mutuel, et reposant sur la proposition vraie que l’Amérique et l’Islam ne s’excluent pas et qu’ils n’ont pas lieu de se faire concurrence. Bien au contraire, l’Amérique et l’Islam se recoupent et se nourrissent de principes communs, à savoir la justice et le progrès, la tolérance et la dignité de chaque être humain. » On voit bien la différence de ton entre Nicolas Sarkozy et Barack Obama, et on mesure le fossé d’incompréhension qui s’est creusé entre la France et les pays arabes. Cela explique les errements diplomatiques que nous avons connus au cours de ces deux derniers mois. François Ernenwein, dans « La Croix » explique bien ce fossé quand il écrit : « Si l’aspiration démocratique au sud de l’Europe avait paru d’emblée légitime, si les dictatures tunisienne, égyptienne, libyenne (pour ne citer qu’elles) avaient été vraiment prises pour ce qu’elles étaient, personne ne se serait risqué à pactiser ostensiblement avec elles avant de devoir prendre du recul. Mais dans la balance coûts-avantages, l’apparente stabilité politique et économique assurée par ces régimes et le rempart qu’ils devaient offrir pour contenir l’islamisme semblaient l’emporter sur bien d’autres considérations. Dès lors, il devenait difficile de comprendre les révoltes naissantes. »

            Michèle Alliot-Marie a incarné en quelques jours à la fois la décadence du comportement de nos responsables, mais aussi son incapacité à diriger la diplomatie de notre pays. Le temps mis par Nicolas Sarkozy à s’en séparer a également terni notre image. Perdu dans nos compromissions, nous n’avons pas pu sentir le vent de la liberté qui s’est mis à souffler en tempête sur l’Afrique du Nord. François Mitterand, à son époque, n’avait pas non plus vu venir, ni compris, la chute du mur de Berlin. Nos élites, repliées sur leur camp et corrompues se satisfont  très bien des régimes en place. Notre peuple s’est recroquevillé sur ses petits problèmes. Nous ne sommes pas gênés de défiler par centaines de milliers contre la retraite à 62 ans et simultanément d’accepter que les salariés du Maghreb ou d’Asie soient payés 5 à 10 fois moins que nous. C’est une forme de décadence de se replier sur ses avantages acquis sans se soucier de la situation des autres. Les comportements autoritaires et corrompus des dirigeants du Maghreb n’ont pas empêché les français de se rendre en masse sur les lieux touristiques de Tunisie et d’Egypte. Il faut donc savoir rester humbles.

 Une vraie question est de savoir si l’ont peut défendre en même temps des intérêts particuliers et des valeurs. Michèle Alliot-Marie, dans sa lettre imposée de démission, ne craint pas d’affirmer qu’elle a le sentiment de n’avoir commis aucun manquement. C’est bien cette inconscience qui est grave, et qui montre la décadence actuelle. Quand on découvre à nouveau que les entreprises du CAC 40 vont verser cette année près de 40 milliards d’euros de dividendes, contre 35 milliards l’année dernière, on peut s’interroger sur la morale de cette société. Quand on voit l’insolence de Didier Lombard, qui, à 69 ans, quitte la présidence de France Télécom, mais reste salarié, on peut aussi parler de décadence et se rappeler la phrase de Jean-Jacques Rousseau : «  On a tout avec de l’argent, hormis des mœurs et des citoyens. » Face au courage des peuples tunisien, égyptien et libyen, tous touchés par le chômage et la pauvreté, on mesure l’indécence de ces comportements décadents, qu’ils soient le fait d’hommes politiques ou de responsables économiques. La grandeur des uns fait contraste avec la décadence des autres.

 

                                                                                                                                                                                                                                  Jacques JEANTEUR

                                                                                                       Mouvement  Démocrate  

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